« Commence en toi-même l’œuvre de paix afin que, pacifié, tu puisses apporter la paix aux autres » (St Ambroise).
Comment ? Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Le second commandement contient une vérité humaine et psychologique capitale : s’aimer soi-même, au bon sens, et aimer les autres vont ensemble.
« Celui qui est dur pour soi-même, pour qui serait-il bon ? (Si 14,5) »
En pratique :
Ne t’en veux pas pour ce qui s’est passé, pour ce que tu as fait, pour ce que tu as dit, pas dit…
Tu as raté cette conférence, cette réunion….Tu as raté peut-être toute cette période de ta vie…Tu as refusé cet engagement au service de tes frères qui s’imposait…..Tu viens de dire des paroles blessantes à cet être cher.
Ne te blesse pas davantage maintenant. Ne remue pas le fer dans la plaie. Ce dont tu as besoin, pour ta blessure, c’est de beaume et de douceur. Sois ton propre bon samaritain. Verse de l’huile et du vin. Car comprend que c’est le même personnage en toi qui, par exemple, vient de dire des paroles blessantes à un être cher et qui maintenant te blesse toi-même. C’est le même qui a raté et qui maintenant secoue les épaules avec dépit et souffrance. C’est le même en toi qui est méchant envers toi et envers les autres. Ne continue pas le cycle de la méchanceté. Regarde le ciel bleu, fais la sieste,va au cinéma.
Faudrait-il donc se pardonner ? Et souvent ? N’est-ce pas dangereux ?
Je répond : Je ne te dis pas de te pardonner 7 fois mais de te pardonner 77 fois 7 fois. Sinon, comment apprendrais-tu à pardonner réellement aux autres ?
Et sans doute c’est dangereux. Mais pas dans le sens qu’on croit ! Car si tu romps avec la routine de l’agressivité, si tu rentres toi-même dans le cycle de la bonté, tu as des chances de te transformer toi-même, d’accepter ce service fraternel la prochaine fois, de ne plus vouloir blesser cet être cher comme tu ne veux pas te blesser toi-même. Alors tu risques de devenir miséricordieux vraiment envers autrui, chose si rare !
Deviens à tes propres yeux un de ces petits qui sont dans le Christ.
Quand tu te condamnes toi-même, tu t’identifies à un juge parfait et sévère, tu te prends pour le Bon Dieu ( lequel, d’ailleurs, en réalité n’est pas impitoyable mais miséricordieux). Tu te déchires alors toi-même, tu deviens ton propre ennemi. Mais il n’y a pas de réconciliation possible, car ces deux personnages en toi, celui que tu condamnes et celui qui condamne, ne valent pas plus cher l’un que l’autre. L’un est ta faiblesse et l’autre ton orgueil. Ce sont de faux partenaires et ils sont les complices d’une même tragédie.
Les vrais partenaires de ton histoire, ce sont : d’une part, toi-même effectivement, celui que tu condamnes sévèrement, celui-là existe vraiment. Et l’autre partenaire en toi, c’est le Christ en toi, Dieu en train de se réconcilier le monde en toi, c’est-à-dire encore toi-même, mais toi-même dans le Christ. C’est le bon prochain en toi, le bon samaritain en toi. Et celui-là est ton meilleur moi !
C’est pourquoi :
- Deviens à tes propres yeux un de ces petits qui sont les frères du Christ, parmi les publicains et les pécheurs, un entre des milliards, un de ces petits qui sont en cours de réconciliation, de transfiguration.
Tu aimeras toi-même comme ton prochain, afin de pouvoir ensuite aimer ton prochain comme toi-même.
Jacques BUISSON